Le débat entre les 3 candidats retenus pour la course à la Présidence de la Fédération Ivoirienne de Football (FIF) était très attendu. Seulement deux, ont répondu à l'appel de la Radiodiffusion Télévision Ivoirienne (RTI). Il s'agit de Yacine Idriss Diallo et de Sory Diabaté qui se sont empoignés, avec en point d'ogre, la fameuse affaire "des 4 milliards".

Le débat a beau avoir été « biaisé » selon Yacine Idriss Diallo qui pointait du doigt l'absence de Didier Drogba, mais les échanges avec Sory Diabaté furent épiques. Surtout en fin d'émission. Gardés dans leur box durant la quasi-majorité du temps imparti par la RTI, les deux favoris pour la succession de feu Sidy Diallo, se sont finalement installés dans le case "punchlines" pour envoyer chacun son adversaire, dans les cordes. Et la première banderille fut plantée par le candidat de la liste "Rassembler pour développer" pour battre en brèche le projet de Sory Diabaté qui consiste à compter sur l'aide de l'état dans le traitement salarial des joueurs des équipes de la Ligue professionnelle. Une vision qui n'est pas partagée par Yacine Idriss Diallo.

“Notre vision personnelle, n'est pas de compter sur un apport de l'état"

« Notre vision personnelle, n'est pas de compter sur un apport de l'état, notre vision est d'essayer de créer par nous-mêmes, la richesse. Aujourd'hui, le volume des ressources identifiées à la Fédération est de l'ordre de 6 milliards, le volume des charges que nous avons identifié à la suite de l'assemblée générale qui a validé les comptes de 2020 est au-delà de 7 milliards et nous avons une dette de l'ordre de 5 milliards. Nous, nous allons centrer notre approche sur la gouvernance. Sur la bonne gouvernance. Sur la gouvernance de qualité. Et pour y arriver, nous avons évidemment chiffré ce qui allait nous coûter notre proposition de gouvernance. C'est de l'ordre de 3 milliards. Et nous avons au jour d'aujourd'hui, mobilisé à travers les partenaires qui nous accompagnent les ressources escomptées pour la saison 2022-2023. Ce n'est pas un projet qui s'appuie sur des promesses de campagne. Ce sont des engagements. Et ces engagements sont pris en compte par notre pool de sponsors », a déclaré Yacine Idriss Diallo (YID). Mais la réplique n'a pas tardée.

S'il n'a pas voulu suivre le même chemin, Sory Diabaté a tout de même repris son contradicteur sur la notion de la dette de la FIF agitée pour justifier sa mauvaise santé financière à la conclusion de la gestion de l'équipe dont il a fait partie sous la direction de feu Sidy Diallo. Ainsi, « en 2011, nous avons fait une passation de charges entre Monsieur Anouma et M. Sidy Diallo. Et quand on parle de dette, je suis bien placé pour dire qu'il y avait bien un déficit de 2 milliards à septembre 2011, lors de la passation des charges. La Fédération de Sidy Diallo a compensé ce déficit d'années en années. Même si une association sportive n'est pas faite pour faire du bénéfice, il faut quand même signaler ce qui a existé. Quand on parle de dette de 5 milliards, en comptabilité ou en finance, généralement, quand vous parlez de dette, vous parlez de créances en face. Mais vous parlez de dette mais jamais de créances en face. On vous dit qu'il y a 5 milliards de dette, mais est ce qu'il n'y a pas de créances ? Mais, s'il y a des créances, pourquoi on ne parle pas de créances qui existaient? Parce que quand vous comparer les dettes aux créances, vous matchez et à partir de ce moment-là, il n'y a pas de catastrophe, il n'y a pas de difficultés majeures », a rétorqué le candidat "Pour La Grandeur du Football Ivoirien".

“C'est faux de dire que 4 milliards ont été détournés"

« On n'est pas venu pour s'attaquer, on est venu pour donner des informations justes. Mais, on ne peut pas accepter de prendre des coups comme on en reçoit depuis le début », a renchéri cette fois Sory Diabaté, loin d'être hésitant lorsque l'affaire du supposé détournement de 4 milliards a été mise sur la table. Au risque de ne pas avoir de temps additionnel, Sory a pris son temps pour dire sa part de vérité. « Il faut savoir que les 4 milliards, c'est en deux étapes, il y a 2 milliards 100 millions, on était ensemble à la FIF, Idriss Diallo et moi. C'est sur la période de 2002 à 2011. Il s'agit de fonds qui ont été mis à la disposition de l'équipe nationale et qui ont été affectés aux dépenses de l'équipe nationale. Ce ne sont pas des fonds qui ont été détournés contrairement à ce qu'on a entendu. C'est faux de dire que ces fonds ont été détournés. Ces fonds ont été virés sur un compte ouvert à la Banque du Trésor (intitulé) "FIF Communication". Sur ce compte l'Etat mettait les fonds pour payer les Eléphants et payer tous les regroupements. Vous savez, lorsque nous nous sommes qualifiés pour la Coupe du Monde 2006, l'Etat a décidé de donner 30 millions à chaque joueur et encadreur. Ce compte a reçu ces fonds. Et ces fonds ont été payés aux joueurs. Et donc, quand on vient faire un audit derrière, on dit que ce compte n'était pas dans la comptabilité de la Fédération. Donc c'est tout. Sur la deuxième partie, il s'agit juste des fonds qui ont été utilisés pour la CAN 2012 et la CAN 2013 pour lesquels les justificatifs avaient été déjà remis au régisseur du Ministère des Finances. Ces documents sont disponibles. C'est donc faux de dire (que l'argent a été détourné). L'argent n'a pas été utilisé par les dirigeants de la Fédération, ce sont de fausses informations. On a fait beaucoup de bruits autour de cela. Et nous avons demandé, à ceux qui le souhaitent, que nous venions, comme nous le faisons aujourd'hui, avec tous les documents, que nous nous trouvions sur un plateau télé, devant la nation, et nous allons présenter tous ce que nous avons comme justificatifs de ces opérations ».

Le défi lancé n’a visiblement pas été relevé par Idriss Diallo qui s’est dit étranger aux affirmations faites par Sory Diabaté. Car, si « il a dit que sur les 4 milliards, il y a 2 milliards pour lesquels vous êtes comptable », selon Samuel Metch, l’autre présentateur de l’émission qui reprenait les dires de Sory Diabaté, Idriss Diallo, impassible, a déclaré : « je ne sais pas de quoi il s'agit ». YID a plutôt fait une adresse pour repréciser le cadre de cette élection. « Il faut qu'on arrête de se faire peur. Nous sommes dans un pays qui a des valeurs. Nous sommes dans un pays qui est organisé. Nous sommes dans un pays qui a des règles. Les règles disent que 81 électeurs vont se prononcer le samedi. A l'issue de cela, un président sera élu. Ce président-là va diriger la Fédération Ivoirienne de Football (FIF). Et puis il n'y a rien. Que ce soit Sory, que ce soit le candidat qui n'est pas là, que ce soit moi-même, on a le droit d'être candidat. Et une fois qu'on est candidat, les électeurs désigneront le meilleur ». De quoi finir en beauté cette belle empoignade. Qui en est sorti vainqueur ? Réponse, le 23 avril 2022 à Yamoussoukro.

Patrick GUITEY